RAPPORT ANNUEL DE LA COMMISSION NATIONALE DE L’INFORMATIQUE ET DES LIBERTÉS
La CNIL est un organisme public indépendant qui est chargé de la protection des données personnelles, elle a un rôle d’alerte, de conseil et d’information mais dispose également d’un pouvoir de contrôle et de sanction.
Le dernier rapport de la CNIL tout juste sorti mentionne qu’en 2023 – année marquée par un nombre record de plaintes reçues et traitées (16 433 plaintes soit + 35 % par rapport à 2022) – elle a effectué 340 contrôles, qui ont abouti à 42 sanctions et à des amendes pour un montant total de près de 90 millions d’euros.
Deux exemples concernent des entités publiques, révélateurs des pouvoirs que s’arrogent certaines au mépris des règles républicaines.
Le premier concerne l’utilisation par des communes de caméras associées à un logiciel de lecture automatisée de plaques d’immatriculation (LAPI). Cette utilisation n’est pas interdite mais la CNIL a relevé que certaines communes l’employaient pour la détection et la poursuite d’infractions. Or cette utilisation est illégale : seuls les services de police nationale peuvent mettre en œuvre de tels dispositifs pour des finalités de police administrative et judiciaire. Les collectivités territoriales n’en ont pas le droit, ce qui n’empêche pas certains maires de passer outre.
Le deuxième exemple concerne l’utilisation par le ministre de la fonction publique d’un fichier des agents publics à des fins politiques.
En janvier 2023, avant le vote de la loi sur les retraites, un message intitulé « Réforme des retraites : Message de Stanislas Guérini aux agents de la Fonction publique » avait été envoyé à près de 2 millions et demi d’agents publics actifs, renvoyant à une vidéo et à un document intitulé « Pour nos retraites, un projet de justice, d’équilibre et de progrès ». Il s’agissait là d’une communication politique, sortant du cadre du décret n°2022-1446 du 21 novembre 2022 régissant la plate-forme « Espace numérique sécurisé de l’agent public » (ENSAP).
Ces exemples montrent qu’il est plus que jamais nécessaire d’être vigilants sur les pouvoirs que s’arrogent les autorités. On peut au passage regretter que, dans le premier cas, la CNIL ait adressé une mise en demeure aux communes concernées, alors que dans le deuxième, l’abus n’a donné lieu qu’à un rappel à l’ordre.
On voit bien la difficulté que posent ces exemples de manquement à l’éthique, qui ne constituent pas véritablement des délits, et pour lesquels il est difficile de prévoir une sanction adaptée, c’est-à-dire véritablement dissuasive.
Il y en a d’autres, notamment en matière d’utilisation d’outils de communication institutionnelle à des fins personnelles, pratique hélas courante dans le domaine politique.
Nous y reviendrons.
https://www.cnil.fr/sites/cnil/files/2024-04/cnil_44e_rapport_annuel_2023.pdf